Handi-Livres 2015 : Coup de Cœur

Handi-Livres 2015 : Coup de Cœur

L'auteur

Jeanne Auber est médecin et exerce cette activité dans un grand hôpital parisien. Elle est également la maman d’une jeune fille de 23 ans souffrant de polyhandicap.

A noter

Avec son mari – Tristan Auber – ils ont publié en 2013 un livre intitulé Bonjour, jeune beauté (éd. Bayard) dans lequel ils ont voulu revenir sur les désordres engendrés par l’arrivée d’un enfant en situation de handicap dans leur vie, mais aussi sur l’amour et les grands moments d’émotion qu’ils ont partagés depuis.

Résumé

C’est l’histoire d’une mère qui se bat au quotidien pour offrir à sa fille polyhandicapée un cadre adapté et bienveillant. C’est l’histoire d’une famille épuisée, classée parmi les « sans-solutions », dont le dossier est prioritaire et qui pourtant empile les refus depuis presque deux ans. C’est l’histoire d’un pays qui préfère envoyer au-delà de ses frontières des personnes dont le handicap est jugé trop lourd, quitte à financer leur prise en charge. C’est l’histoire d’un scandale français qui se joue en Belgique. « À ce jour, au moins 6 500 enfants et adultes handicapés mentaux sont en Wallonie, à quelques centaines de mètres parfois de leur terre natale. »

Critique/Avis

Dans Les exilés mentaux, Jeanne Auber se fait le porte-parole de ces nombreuses familles plongées dans la souffrance et le désespoir de ne pas pouvoir faire intégrer leurs enfants en situation de handicap dans les structures adaptées. Elle dénonce un aberrant problème de nomenclature qui permet la prise en charge de certains types de handicap mais qui laisse « sur le carreau » toutes celles et ceux qui ne rentrent pas dans les cases des dispositifs proposés. S’il existe bien un certain nombre d’établissements spécialisés, leur capacité d’accueil est très restreinte et oblige souvent les personnes concernées à vivre éloignées de leur entourage et à la condition qu’une rare place soit disponible. L’auteur lance ici un appel important à la responsabilité collective pour mettre un terme à l’hypocrisie de nos institutions qui affirment s’engager en faveur du handicap mais qui n’hésitent pas à envoyer ces personnes trouver des solutions en Belgique. C’est tout un « obscurantisme de l’Etat » qu’elle dénonce alors, avec certains conseils généraux, ou centres de sécurité sociale, qui acceptent de financer un accueil en Belgique ou dans un autre département, tandis que d’autres refusent. Alors qu’un recensement des personnes concernées permettrait déjà de poser des réflexions à l’échelle nationale, de mettre en place des centres et de participer à la création d’emplois, Jeanne Auber souligne la faiblesse et l’incohérence d’un pouvoir public effrayé par l’intégration des personnes en situation de handicap mental. Une frilosité qui devient scandaleuse au regard de la détresse des familles – le cas cité d’un père ayant tué sa fille handicapée âgée de 6 ans est bouleversant mais tellement représentatif de la solitude dans laquelle sont plongées ces familles. Un témoignage fort et qui doit être mis en lumière pour faire avancer les choses.

L’histoire

Avec ce nouveau livre, Jeanne Auber évoque son combat pour que sa fille soit en mesure d’intégrer un établissement adapté aux soins qu’elle nécessite. À travers sa propre expérience, elle dresse le portrait de ces nombreuses familles qui n’ont d’autres solutions que de vivre séparées de leurs enfants et qui se sont résignées à solliciter des structures situées en Belgique. Ils sont ainsi plusieurs milliers (enfants et adultes) à avoir fait le (non) choix de vivre à plusieurs centaines de kilomètres de chez eux et de leurs proches, faute de places en France. Le nombre de personnes handicapées mentales françaises dans les institutions belges ne cesse donc de croître, comme l’explique l’auteur qui revient sur le cas de son département : sous couvert de manque de places, les autorités du Val de Marne ont été incapables de proposer le moindre bout de solution pour sa fille, lui refusant même le financement d’un accueil dans un autre département. C’est cette violence qui est racontée dans le livre ; une violence que ressentent tous les parents devant le refus des institutions à chercher des solutions. C’est également l’occasion pour elle de revenir sur sa déception à chaque nouveau dispositif mis en place par les différents gouvernements qui se succèdent. Son impatience aussi devant des procédures engagées depuis deux ans et qui restent lettre morte. Un livre qui interroge donc les institutions françaises : incompétentes sur de nombreuses problématiques liées au handicap et qui n’hésitent pas à envoyer les familles chercher des solutions en Wallonie, comme une façon de « se débarrasser » du problème.